L'évolution de l'Horloge Horizontale
au XVIIIe siècle

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Si l'invention de l'horloge horizontale incombe à Julien Le Roy, le modèle qu'il proposa fut repris par un certain nombre d'horlogers pour être amélioré significativement. 

Utilisation de trois roues par rouages, plutôt que deux : l'horloge du Séminaire Etranger décrite par Julien Le Roy est à deux roues, c'est à dire qu'en plus de l'axe du barillet, il n'y a qu'un autre axe pour l'échappement. Julien Le Roy utilise cet agencement « parce que, dit-il, il n'y a de frottement que sur un seul pignon : de plus, son pendule a douze pieds de longueur [3,9 m], et sa lentille pèse seize livres [8 kilos]... » [C0002, p. 164, repris dans C0016, p. 231]. Dès 1741, Thiout montre que cette disposition n'est pas idéale et qu'il vaut mieux utiliser des rouages à trois axes [C0017, p. 395]. Thiout explique en particulier que le modèle à deux roues implique l'utilisation d'un très long balancier, qui ne peut osciller simplement d'un arc suffisant, ainsi que l'utilisation d'un petit pignon et autres désavantages. D'ailleurs, l'utilisation de trois roues par rouage était la disposition commune depuis l'utilisation du balancier par Huygens. L'horloge faite en 1769 par Pépin sous la direction de Le Roy utilisera trois roues.

Modification de l'échappement : en 1751, Julien Le Roy propose l'utilisation d'un échappement à double verges et à rouleau, pour l'horloge du beffroi d'Amiens. Ce type d'échappement à recul fut rapidement abandonné pour les horloges d'édifice qui sont soumises à des contraintes importantes. Sur l'horloge du beffroi d'Amiens, il fut remplacé dès 1765-1768 par un échappement à chevilles, modèle Le Paute [G0027, p. 24]. De même, dans le livre de Sully, Le Roy propose un échappement à deux leviers, ce qu'il reconnaîtra plus tard comme une erreur. Thiout mentionne également ce problème et propose un échappement à ancre.

Mais l'évolution la plus significative viendra de l'agencement des rouages :

Horloge horizontale. Les rouages sont bout à bout.
Nous notons cette disposition = =
Horloge fabriquée par Laguerre, 1802 ? [E015].
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Horloge horizontale. Les rouages sont parallèles.
Nous notons cette disposition || ||
Fabricant probablement Plagniard.
Probablement début du XIXe siècle [E043].
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L'horloge horizontale à rouages parallèles, encore appelée parfois, la forme traineau. Il s'agit du changement le plus radical par rapport à l'horloge de Julien Le Roy. Les rouages sont alors alignés entre deux barres parallèles. Le rouage de mouvement, au lieu d'être face au rouage de sonnerie, se retrouve dans le même alignement. Tous les rouages sont alors parallèles (nous notons ce type d'agencement || || par opposition aux rouages bouts à bouts notés = = ).


Horloge horizontale à rouages || ||
Exécutée par la maison Lepaute, en 1780 pour un pavillon
 de la caserne de Noailles, à Versailles [C0018, p. 179].
Sur le bâti : « Fait par LE PAUTE, oncle et neveux,
Horloger du Roi et de Monsieur à PARIS en 1780 »
Remarquons la roue frontale servant à ajuster la longueur
du balancier pour que l'horloge indique le temps vrai.
(Cliquer sur l'image pour l'agrandir)


Jean-André Lepaute
1720-1789

La paternité de cette invention n'est pas clairement identifiée. Cependant, la plus ancienne horloge de ce type que nous connaissons date de 1780 et est due à la maison Lepaute (probablement Jean-Baptiste Le Paute). Bizarrement, les Lepaute continueront à fabriquer des horloges horizontales des deux types pendant les années qui suivent. La forme || || ne s'est donc pas imposée immédiatement. Pourtant les avantages de cette nouvelle disposition sont importants par rapport à la première version d'horloge horizontale. 

  • Le cadre de l'horloge est un rectangle, simple à fabriquer.

  • Les axes pour remonter les poids sont d'un seul côté de l'horloge, même lorsque l'horloge est à quarts.

  • La disposition des rouages est simple, facile à entretenir, à démonter. Chaque axe peut être monté sur des petites platines permettant un démontage indépendant du reste de l'horloge.

  • Par contre, les détentes entre le rouage de mouvement et les rouages de sonneries sont un peu plus complexes que dans le modèle précédent.

Cette forme d'horloge horizontale s'impose au XIXe siècle et domine la fabrication des horloges d'édifice mécaniques jusqu'à leur disparition, dans les années 1950. Les horlogers parisiens l'adoptent en premier, suivient petit à petit par leurs homologues de province. Son inconvénient majeur, qui est celui de la place qu'elle prend dans un clocher ou une tour, donnera lieu à quelques évolutions ultérieures, en particulier l'horloge horizontale à mouvement triangulaire. Mais ces évolutions seront toujours des variations sur la forme de base conçue à la fin du XVIIIe siècle. Ainsi que l'écrira Claudius Saunier en 1878, « les horloges doivent à Julien Le Roy la disposition des mobiles dans un plan horizontal ; aux Lepaute de meilleures proportions, une belle exécution et l'usage de l'échappement à chevilles [C0008] ».

Sur le plan de la diffusion des inventions, notre hypothèse centrale est donc que les grands horlogers parisiens du XVIIIe siècles, poussés entre autre par le fait qu'ils étaient distancés par leurs collègues anglais sur le marché des montres et des horloges d'intérieur, se sont intéressés aux horloges d'édifice. Ils en ont amélioré de façon significative la conception. Ces évolutions se sont propagées d'abord en province, puis dans le reste du monde, pour finir au Royaume-Uni dans la seconde moitié du XIXe siècle. 

Durant cette seconde période, les grands horlogers parisiens avaient déjà délaissé l'horlogerie d'édifice mécanique. La mode était alors à la diffusion de l'heure publique par des moyens électriques ou pneumatiques. De leur côté, les horlogers anglais innovaient à leur tour, en particulier au niveau des échappements, tels que l'échappement à gravité. Ces inventions ne se sont jamais imposées en France, non seulement du fait de la rivalité franco-britannique, mais aussi parce que l'horlogerie d'édifice à cette époque n'était plus poussée par les innovateurs parisiens.

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Dernière mise à jour de cette page : 28/07/2011